Melville, la nuit

Griffures

“On les aime bien, les petites griffures de l’amour.”

Je ne me souviens plus exactement quand tu as dit ça. Je crois que tu commentais un chant d’opéra. Je ne me souviens plus vraiment ce que j’ai répondu. J’ai probablement dû aller dans ton sens. Mais en réalité, ce n’est pas mon cas. 

Je n’aime pas les griffures de l’amour. Je n’aime pas la douleur. Je n’aime pas la ressentir ni l’infliger. Je n’aime pas le drame, le conflit, le doute, l’angoisse, les reproches ou la culpabilité. J’aime l’amour serein et complice, celui qui naît de deux envies qui se rencontrent. J’aime l’amour qui construit, pas celui qui détruit. J’aime l’amour doux qui fait du bien. Je refuse la mythologie de la souffrance comme preuve et passage obligé de l’amour.

J’accueille le manque quand il existe, mais je ne veux pas, je ne veux plus de dépendance. Je cherche des camarades de jeu, des camarades de vie, pas des interlocuteurices de tragédies. 

Aujourd’hui j’ai mal comme je ne veux plus jamais avoir mal. Je sens les serres dans mes viscères, les ergots dans mon cerveau. Je ne me sens pas plus vivante. Je ne me sens pas plus intense. Je me sens juste déchirée, et je ne veux pas d’amour qui m’inflige ça. 

 

“On les aime bien, les petites griffures de l’amour.”

Non. On les aime bien les petites caresses de l’amour. Les mots doux. Les attentions affectueuses. Le délassement des corps qui s’étreignent. Les regards qui donnent confiance en soi. Les mains qui s’entremêlent dans l’obscurité des salles de cinéma. Je vis pour aimer, je n’aime pas pour pleurer.